Revue de presse : Interview de Hervé Quénol, membre du CA de l’ ARVB.
Le réchauffement climatique avantage la viticulture bretonne
Par La rédaction de larvf.com Mis à jour le 10/09/2020 à 11:44
Partager La culture de la vigne se développe en Bretagne en raison de conditions climatiques de plus en plus favorables, même si les précipitations restent un frein.
- Hervé Quenol est climatologue, directeur de recherches au CNRS (Laboratoire LETG, Université Rennes 2).
Avec le réchauffement climatique, la Bretagne devient-elle une région propice à la culture de la vigne ?
Hervé Quenol : La Bretagne connaît un engouement assez incroyable. Ces dernières années, énormément de petits vignobles ont été plantés parce que les conditions thermiques sont intéressantes. Jusqu’à récemment, c’était plutôt des associations ou des agriculteurs qui plantaient quelques plants de vigne. Maintenant, les premiers vignobles commerciaux commencent à se planter. On observe une remontée vers le nord des zones de culture potentielle de la vigne. La vigne a besoin d’une somme de températures accumulées tout au long de sa croissance. Aujourd’hui, en Bretagne, on est au niveau des températures de l’Anjou d’il y a 50 ans. À la station météorologique de Quimper, on a une valeur (thermique) qui équivaut à ce qu’on avait à Angers dans les années 70-80. Lire aussi :
Ce phénomène est-il voué à se poursuivre dans les années à venir ?
Au niveau des températures, c’est assez positif. Il y a pas mal d’incertitudes mais il n’y a aucune raison qu’on n’arrive pas à faire du vin en Bretagne ces prochaines décennies. Les conditions seront bien plus favorables qu’aujourd’hui. Cependant, on parle toujours de la température mais il y a encore beaucoup de précipitations notamment l’été, ce qui pose des problèmes de maladie pour la vigne. Dans la moitié nord de la France, il n’y a pas eu d’augmentation ou de diminution des précipitations sur le siècle passé. Et sur les simulations du changement climatique futur, tous les modèles ne donnent pas la même chose. C’est assez complexe.
À contrario, on a vu des vignes brûler à cause de la canicule de 2019 dans le sud de la France. Les vagues de chaleur ne risquent-elles pas de rendre impossible la culture de la vigne dans certaines régions ?
Pour éviter ce type de problèmes, qu’on appelle l’échaudage, il y a des moyens d’adaptation. Le viticulteur évite par exemple d’effeuiller trop sa vigne de manière à protéger les grappes. Jusqu’à une certaine limite, les pratiques des viticulteurs peuvent limiter ce risque mais si les vagues de chaleur se succèdent, cela pourra poser des problèmes. D’une manière générale, l’impact des événements extrêmes va dépendre de l’intensité de l’événement mais surtout de la répétitivité les années suivantes. Si ces événements se répètent plusieurs années de suite (ce qui est prévu par les modélisations du climat futur), l’adaptation par les pratiques des viticulteurs sera beaucoup plus compliquée. Le problème va être aussi lié à la sécheresse dans le Sud. Pour le moment, on n’irrigue pas la vigne. Il y a une demande de la profession de pouvoir irriguer. Mais s’il n’y a plus d’eau, l’eau n’ira pas en priorité pour la vigne.